41ème chronique Pour en finir vraiment avec le chômage !

Pour ceux qui avaient encore des doutes, les non convaincus, les partisans du travailler plus pour gagner plus …ou moins, il est urgent de lire le dernier ouvrage de Pierre Larrouturou et Dominique Méda : « Einstein avait raison – il faut réduire le temps de travail » (Les Editions Ouvrières 2016). Un constat et une démonstration incontournables.

Le progrès technique a procuré des gains de productivité qui ont été multipliés par deux de 1820 à 1960 et par cinq de 1960 à 2015 (pp74-75). Ce qui signifie que pour la même production, on a besoin de cinq fois moins de main-d’œuvre qu’il y a cinquante ans !  Or le PIB (l’indicateur de croissance) a été multiplié par 4,6 depuis 1960 (source INSEE) : on a donc besoin de moins de main d’œuvre aujourd’hui qu’à l’époque ! Pendant ce temps la population active (occupés et chômeurs) est passée de 19 à 29 millions environ. On devrait donc mécaniquement retrouver aujourd’hui plus de 10 millions de chômeurs car en 1960 le chômage était quasiment inexistant !

C’est la baisse effective de la durée du travail au cours de ces cinquante dernières années qui a limité en partie le nombre de chômeurs car le nombre d’heures travaillées est bien resté le même ! Sait-on qu’aux US la durée hebdomadaire du travail est désormais de 33,7 heures par semaine, qu’en Allemagne elle est de 30,3 heures et à peine 30 heures aux Pays-Bas (pp82 à 85) ! Car il ne faut pas comparer, comme c’est le cas dans la plupart des statistiques affichées, la durée du travail des emplois à temps complet mais la moyenne de la durée du travail de tous les emplois y compris à temps partiel.  L’Allemagne a créé 4 millions d’emplois entre 1994 et 2014 sans augmenter d’une seule heure le nombre d’heures totales travaillées. Le temps partiel y représente 27% de l’emploi total contre 18 % en France. C’est pour cette unique raison que le taux de chômage est plus faible qu’en France que dans ces trois pays[1].

La véritable question n’est donc pas de réduire le temps de travail car c’est la seule solution. Elle est de savoir si cette réduction doit être subie (je voudrai un emploi à plein temps mais je suis obligé d’accepter un emploi à temps partiel, ce qui est le cas de la grande majorité des personnes travaillant à temps partiel) ou voulue (partage organisé du temps de travail grâce à la généralisation de la semaine à 32 heures permettant à chacun de trouver un emploi à temps plein).

Le problème est désormais crucial car la numérisation et la robotisation des économies vont encore faire disparaitre des centaines de milliers d’emplois dans les années à venir.

Or la mise en œuvre de la semaine de 4 jours et quasiment sans baisse de salaires peut se faire sans surcoût car globalement les emplois nouveaux sont financés par la baisse des cotisations sociales et les impôts supplémentaires permis par les hausses d’emplois (cf Patrick Artus 1993 ou le rapport Romagnan Assemblée Nationale déc 2014).  Toutes les expériences menées dans le cadre des lois ROBIEN ou des premières lois AUBRY à la fin des années 90 ont été concluantes : Mamie Nova, La Macif, Yprema, les brioches Pasquier,…

Tous les acteurs politiques sont persuadés que c’est la seule solution pour en finir avec le chômage (pp238-239) :

  • Jacques Chirac en 1995 : « pourquoi ce qui se fait chez Pasquier ne se fait pas ailleurs ? » ;
  • Gérard Larcher, actuel président du Sénat , déposait en 1993 un amendement pour expérimenter les 32 heures ;
  • Jacques Barrot, ministre du travail en 1997 : « Larrouturou a raison : on peut créer 2 millions d’emplois en passant à 4 jours » ;
  • Le rapport Boissonnat en 1995 : « il faut baisser la durée du travail de 20 à 25% d’ici 20 ans » ;
  • -…

Alors que diable, un peu de courage politique.

Avec un peu de bon sens, bon sang !

FEMERAC

 

 

[1] Il y a en réalité une autre raison : c’est le taux d’activité : beaucoup de personnes renonce à rechercher un emploi et sortent des statistiques. On a déjà montré (cf 10ème chronique juin 2015) que le taux de chômage était un indicateur tout à fait inapproprié.

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