Charlie…c’était seulement beaucoup de tristesse !

Emmanuel Todd a lancé la polémique en parlant du 11 janvier comme d’une imposture et d’un élan islamophobe. Bigre !

Jean Daniel dans son édito du Nouvel Obs du 7 mai dernier pensait, à propos de ces manifestations qui ont réuni environ 4 millions de personnes, qu’ “on n’a pas été très loin de la  glorieuse Fête de la fédération du 14 juillet 1790”. Sacrebleu !

Ils se trompent tous les deux, comme beaucoup d’autres : le 11 janvier n’était rien d’autre qu’une grand’messe, une communion collective animée par la seule tristesse de la perte violente de la sympathique équipe de Charlie hebdo. Non pas pour regretter l’hebdomadaire que personne ne lisait plus, mais parce qu’avaient été massacrés des gens aussi représentatifs de notre esprit franchouillard que sont Cabu et Wolinski. Heureusement, si je puis dire, les deux meilleurs d’entre eux étaient déjà morts : l’immense Reiser et le talentueux Cavanna.

Une messe, vous dis-je, un rassemblement pour évacuer la tristesse profonde (qui n’a pas versé une petite larme le 7 janvier ? oui moi aussi !) et aussi la peur du danger : la menace terroriste qui restait hypothétique devenait soudain une réalité prégnante. Le 11 septembre c’était déjà 13 ans auparavant, et puis c’était aux Etats-Unis. C’est loin…. Alors ce besoin de se soutenir collectivement. De montrer qu’on était encore vivants, un sursaut pour dire que tout cela était absurde.

Je n’ai pas défilé le 11 janvier. Je n’aime plus les messes, surtout quand elles sont animées par certains personnages douteux. On peut aimer l’accolade Hollande-Merkel, et moins apprécier la présence de Nétanyahou, assassin notoire d’enfants palestiniens (même s’ils servaient de boucliers humains). On peut aimer « Je suis Charlie » comme un cri de rassemblement, on peut moins aimer qu’il soit devenu un slogan publicitaire mangé à toutes les sauces. On peut regretter aussi d’entendre des « vive la police » , c’est mon côté libertaire !

Et surtout on peut regretter que cette unité dans le drame ne crée aucun rapport de force nouveau ni aucune dynamique contre le crime terroriste, qu’elle renforce les forces brunes dans leurs convictions xénophobes (cf les dernières élections) et surtout ne conduise quelques semaines plus tard à autoriser le pouvoir et son opposition unanime à prendre des mesures liberticides telle la loi sur le renseignement : on (qui ?) pourra écouter n’importe qui sans l’aval du juge et pour des raisons bien minces. Gravissime !

Il est regrettable que les 2 000 morts de Boko Haram au Nigeria quelques jours après nos 17 morts du 7 janvier, avec une majorité de femmes, d’enfants et de personnes âgées, n’ait pas soulevé une telle émotion. Trop loin !

On était tous tristes. Ils ont manifesté par millions. And so what ?

FEMERAC

PS : Il est des voix pour s’offusquer de l’action de Robert Ménard, maire apparenté FN de Béziers, qui a répertorié les prénoms des élèves pour repérer ceux qui n’avaient pas une consonnance bien de chez nous. Ces voix ont raison de s’offusquer, mais ne soyons pas naïfs : les forces brunes sont dans la place et agissent comme des forces brunes.

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